Texte d’Alain Barthélémy, à propos de l’exposition Permafrost à la MAPRAA en Mars 2019.
« Ce que l’on appelle entropie, est cette idée communément
admise que la quantité de désordre augmente dans l’univers. En
terme de température, l’entropie se manifeste par un mouvement
vers le froid. C’est ce principe d’irréversibilité des
phénomènes physiques, qui veut que par l’uniformisation de la
distribution des énergies, toute chose est amenée à se refroidir :
à devenir inerte, glacée ; à atteindre le zéro absolu. »
Ce qu’oublie de nous dire l’anthropocène, est que cette ère géologique que l’on caractérise par la capacité des sociétés humaines à altérer le climat et l’environnement à une échelle planétaire, ne représente en rien le dernier chapitre d’une histoire du monde. Si le narrateur ne sait jamais que raconter sa propre histoire, il faut alors se rappeler que la vie ne s’arrête pas avec l’humanité. En définitive, si l’anthropocène nous indique un moment où il nous est donné de percevoir les conditions d’anéantissement de ce qui et nécessaire à nos vies, il n’appelle en rien à une qualité qui serait pourtant tellement utile en cet instant : l’humilité. L’humilité tout d’abord, de celui ou celle ne se perçoit pas au centre, mais au sein de. Mais aussi cette humilité qui nous fait comprendre que nous ne pouvons exister sans les autres, et que respecter les équilibres en place, est avant tout une façon de se respecter.
Dans une situation de survie, où tout devient ressource, la lumière du jour autant que l’eau ou la chaleur, dans une situation où ne rien faire devient synonyme de mort, l’humilité s’impose d’elle – même. Les séquences vidéos de l’installation Permafrost de Guillaume Seyller jouent d’une situation qui pourrait être celle de la survie. Celle d’un personnage numérique, livré à lui-même dans un désert de neige et de vent : forêts silencieuses et village abandonné. Mais un glissement se met peu à peu en place, et l’on comprend que ce personnage à deux faces n’est pas soumis aux contraintes de notre monde physique. Qu’il s’agit en fait d’un personnage liminal, situé au seuil, à l’interface entre deux mondes. D’une part notre monde physique capturé par la caméra ; d’autre par un monde simulé, environnement numérique, couche spectrale que l’on perçoit par ses invisibles.
Tout personnage situé à la frontière entre deux mondes, parce qu’il a accès à un monde où tout est connu, à un monde qui détient toutes les réponses, ne peut se livrer que de manière cryptée. Un code, une énigme, sont les seules formes possibles d’un langage, d’une gnose qui émane d’un état de conscience supérieure. L’énigme ici, est celle de gestes et de mouvements ; la transe d’un avatar numérique s’extériorise dans des boucles d’animation : un walking cycle stationnaire, des glitchs pour le clignements des yeux. Cet état-limite, cette bipolarité, se manifeste également dans l’apparence du personnage de Permafrost. Une face avant se voit texturée à l’image de Guillaume Seyller, tandis qu’une face arrière reçoit un traitement d’un gris uniforme traversé d’une croix blanche. Cette croix, présente également dans le dos du personnage de Distrupting the photons est en fait une couture. Un modèle 3D possède en effet ce que l’on pourrait appeler une peau : une texture, une image que le moteur de rendu va venir appliquer sur le volume. Cette couture est donc peut-être là pour nous rappeler que les personnages de ces vidéos ne veulent être rien d’autre que des pantins animés, mesh ou squelettes sur lesquels on serait venu plaquer une enveloppe interchangeable. On retrouve ici une couche spectrale, celle d’une peau enveloppant un corps absent.
Que cela soit dans My ghost lies in a body, Disrupting the Photons ou Permafrost, un procédé jouant d’aller-retours entre vidéo et 3D, confrontant environnement physique et monde simulé, permet à Guillaume Seyller de faire vivre des spectres, qui par leurs invisibles, par leur transe, leur présence liminale, nous livrent un message crypté sur notre monde. Ces spectres, qui se jouent de l’invariance des phénomènes physiques : lumière, matière, gravité, nous questionnent sur la nature de notre monde et notre environnement. L’aridité des paysages, qu’elle soit de poussière ou de glace, est la composante principale des décors de ce théâtre d’ombres, qui nous rappelle cette leçon d’humilité : il est de notre ressort de préserver cet environnement, seul équilibre recellant les conditions de notre survie.
Ce qu’oublie de nous dire l’anthropocène, est que cette ère géologique que l’on caractérise par la capacité des sociétés humaines à altérer le climat et l’environnement à une échelle planétaire, ne représente en rien le dernier chapitre d’une histoire du monde. Si le narrateur ne sait jamais que raconter sa propre histoire, il faut alors se rappeler que la vie ne s’arrête pas avec l’humanité. En définitive, si l’anthropocène nous indique un moment où il nous est donné de percevoir les conditions d’anéantissement de ce qui et nécessaire à nos vies, il n’appelle en rien à une qualité qui serait pourtant tellement utile en cet instant : l’humilité. L’humilité tout d’abord, de celui ou celle ne se perçoit pas au centre, mais au sein de. Mais aussi cette humilité qui nous fait comprendre que nous ne pouvons exister sans les autres, et que respecter les équilibres en place, est avant tout une façon de se respecter.
Dans une situation de survie, où tout devient ressource, la lumière du jour autant que l’eau ou la chaleur, dans une situation où ne rien faire devient synonyme de mort, l’humilité s’impose d’elle – même. Les séquences vidéos de l’installation Permafrost de Guillaume Seyller jouent d’une situation qui pourrait être celle de la survie. Celle d’un personnage numérique, livré à lui-même dans un désert de neige et de vent : forêts silencieuses et village abandonné. Mais un glissement se met peu à peu en place, et l’on comprend que ce personnage à deux faces n’est pas soumis aux contraintes de notre monde physique. Qu’il s’agit en fait d’un personnage liminal, situé au seuil, à l’interface entre deux mondes. D’une part notre monde physique capturé par la caméra ; d’autre par un monde simulé, environnement numérique, couche spectrale que l’on perçoit par ses invisibles.
Tout personnage situé à la frontière entre deux mondes, parce qu’il a accès à un monde où tout est connu, à un monde qui détient toutes les réponses, ne peut se livrer que de manière cryptée. Un code, une énigme, sont les seules formes possibles d’un langage, d’une gnose qui émane d’un état de conscience supérieure. L’énigme ici, est celle de gestes et de mouvements ; la transe d’un avatar numérique s’extériorise dans des boucles d’animation : un walking cycle stationnaire, des glitchs pour le clignements des yeux. Cet état-limite, cette bipolarité, se manifeste également dans l’apparence du personnage de Permafrost. Une face avant se voit texturée à l’image de Guillaume Seyller, tandis qu’une face arrière reçoit un traitement d’un gris uniforme traversé d’une croix blanche. Cette croix, présente également dans le dos du personnage de Distrupting the photons est en fait une couture. Un modèle 3D possède en effet ce que l’on pourrait appeler une peau : une texture, une image que le moteur de rendu va venir appliquer sur le volume. Cette couture est donc peut-être là pour nous rappeler que les personnages de ces vidéos ne veulent être rien d’autre que des pantins animés, mesh ou squelettes sur lesquels on serait venu plaquer une enveloppe interchangeable. On retrouve ici une couche spectrale, celle d’une peau enveloppant un corps absent.
Que cela soit dans My ghost lies in a body, Disrupting the Photons ou Permafrost, un procédé jouant d’aller-retours entre vidéo et 3D, confrontant environnement physique et monde simulé, permet à Guillaume Seyller de faire vivre des spectres, qui par leurs invisibles, par leur transe, leur présence liminale, nous livrent un message crypté sur notre monde. Ces spectres, qui se jouent de l’invariance des phénomènes physiques : lumière, matière, gravité, nous questionnent sur la nature de notre monde et notre environnement. L’aridité des paysages, qu’elle soit de poussière ou de glace, est la composante principale des décors de ce théâtre d’ombres, qui nous rappelle cette leçon d’humilité : il est de notre ressort de préserver cet environnement, seul équilibre recellant les conditions de notre survie.